Sangsues

Synopsis : Êtes-vous sûr que personne ne s’invite chez vous pendant votre absence ? Ne vous est-il jamais arrivé, en regagnant votre domicile à la fin de la journée, de remarquer d’infimes changements ? Un coussin qui aurait légèrement changé de place sur le canapé, une bouteille de jus de fruits un peu moins remplie que lorsque vous l’avez rangée dans le réfrigérateur le matin, une bouteille de shampoing que vous étiez persuadé d’avoir refermée mais que vous trouvez ouverte ? Vous vous êtes fait la remarque, puis vous êtes passé à autre chose, car après tout, c’est très probablement votre mémoire qui vous joue des tours, quoi d’autre…

Pour Yoko, c’est la réalité. Ordinaire à premier vue, cette jeune fille de 21 ans s’est évaporée pour échapper à sa vie « d’avant ». Nous ne la voyons pas, mais elle est là, juste sous nos yeux : elle vit chez nous pendant notre absence, allant d’un appartement à un autre selon ses besoins et ses envies.
Si cette nouvelle existence se déroule dans l’insouciance et l’enthousiasme, Yoko déchante rapidement. Elle se croit seule dans son cas, elle va découvrir toute une société parallèle où la violence est omniprésente. Immigrés clandestins, criminels en cavale ou simples citoyens ayant tourné le dos à la société pour des raisons plus ou moins avouables, les sangsues se disputent nos domiciles, qu’elles appellent des nids, s’affrontent dans de sanglantes guerres de territoire et se livrent à des vendettas qui tournent volontiers au massacre.

Mon avis: Ce synopsis original m'avait beaucoup intriguée à la sortie du premier tome, mais j'avais un peu mis le titre de côté sans plus y repenser, faute de motivation pour commencer encore une nouvelle série...
Les critiques dithyrambiques de Wladimir Labaere et l'annonce qui indiquait que ce seinen était terminé en 5 tomes (une information qui m'était passée complètement au-dessus de la tête, je l'avoue) m'ont finalement décidée à sauter le pas, avec l'achat (compulsif?) des deux premiers volumes!

Sacrée surprise que ce Sangsues, mais quelle bonne surprise! Ça faisait longtemps que je n'avais pas autant accroché à une nouveauté de ce genre!
L'atmosphère est fichtrement bien rendue, c'est très réaliste, et on s'imagine tout à fait que ce genre de choses pourrait nous arriver dans la vraie vie...
Le caractère un peu détaché de l'héroïne, l'intrigante et dangereuse aura du garçon qu'elle va rencontrer, le monde caché des "sangsues", complètement sans foi ni loi puisque ses occupants n'ont plus ni identité ni adresse, tout cela crée une tension à la lecture, avec des codes complètement différents de ce à quoi on est habitués, si bien qu'on ne sait jamais à quoi s'attendre.
Le parallèle avec la thématique des "enfants noirs" est d'ailleurs super bien pensé, et nous offre des rebondissements toujours plus inattendus!
Côté graphismes, Daisuke Imai nous offre un coup de crayon moderne et net, un chara-design expressif, le tout sublimé par les couvertures alternatives proposées par l'éditeur, que je trouve personnellement plus parlantes que les japonaises, pari réussi donc (c'est d'ailleurs une édition de qualité qu'on a entre les mains, avec même des pages en couleur!).

Un petit coup de cœur, à confirmer par la suite, mais une lecture que je vous recommande en tout cas si son thème vous interpelle et que vous aimez les récits un peu noirs!
Ça m'étonne d'ailleurs que certaines personnes n'aient pas ouvert un topic dessus avant moi!

Sangsues #3: oh là là ce manga. CE MANGA.
Sérieusement, j'adore vraiment, on se fait complètement happer par la lecture. \o/

Le retour aux sources de Yoko ne va pas se passer comme elle l'imaginait, tandis que le monde des sangsues n'en finit pas de dévoiler ses sanglants secrets...

Le titre est de plus en plus violent (pour notre plus grand défoulement plaisir!) et reste finement écrit en même temps: le monde que décrit Daisuke Imai est terriblement réaliste, et tous ces gens complètement paumés, sans repères, et qui vivent en marge de la société, pourraient être nos voisins, des passants anonymes, ou nous-mêmes qui sait, tant il semble que tout peut arriver dans une vie et nous faire facilement basculer de l'autre côté.

Tantôt faible et fuyante, tantôt déterminée et courageuse, Yoko marche sur la corde entre les deux mondes et incarne tour à tour les deux visages. Jeune fille perdue et fugueuse, ou véritable sangsue sans identité, elle va devoir choisir son camp et assumer son choix.
En parallèle, on découvre un peu plus le charismatique Kara, coquille vide et machine à tuer, peu à peu bouleversé par l'intrusion de son ex-camarade dans sa vie...
Ajoutez à cela l'arrivée dans le jeu d'un psychopathe complètement barge et obsessionnel, et vous avez entre les mains un sacré thriller dont la tension monte encore d'un cran!

Une chouette lecture pour Halloween (une chouette lecture tout court d'ailleurs)!  
(Jetez-vous dessus!)

Yûko a écrit:

Par ailleurs, Casterman nous offre une édition très soignée, avec une page couleur en début de volume, mais on notera toutefois qu'en cette rentrée 2016, une petite augmentation semble avoir discrètement frappé la collection Sakka (7,95€ -> 8,45€).

Et donc Manga-News a fini par le remarquer aussi:
http://www.manga-news.com/index.php/actus/2016/01/18/Une-augmentation-de-prix-chez-Casterman

Suite de l'affaire (cf. post précédent):

Wladimir Labaere a écrit:

"Tout d’abord nous sommes sincèrement désolés que les lecteurs aient appris ce changement de prix en arrivant à la caisse de leur libraire. Il s’agit d’une augmentation mécanique que Casterman aurait dû annoncer en amont afin que les lecteurs qui le voulaient puissent se procurer avant le 1er janvier les tomes des séries auxquelles le code-prix SA35 est affecté.

Voici ensuite quelques éléments expliquant cette augmentation de 0,50 € : le code-prix SA35 n’avait pas bougé depuis janvier 2013, soit trois ans, ce qui représente un effort considérable de la part de Casterman sachant que, comme partout ailleurs, les coûts de production ne vont pas en baissant, bien au contraire (adaptation graphique, prix du papier, impression, stockage, distribution, la liste est longue). En outre, et c’est sans doute le point qui mérite le plus d’être souligné, cette augmentation était nécessaire au maintien des standards de qualité de Casterman en matière d’édition et de fabrication. Il était hors de question que nous proposions des mangas dont la qualité aurait été en deçà de nos exigences. Enfin, même réévalué, ce code-prix est loin de placer les mangas de la collection Sakka parmi les plus chers du marché sur le segment du seinen.

Nous sommes conscients que le budget des lecteurs n’est pas extensible. Mais, encore une fois, cette augmentation répond à une nécessité et a été calculée au plus juste afin de trouver un équilibre, toujours délicat, entre prix de vente et richesse de l’expérience de lecture. Qu’il s’agisse du choix des séries ou du soin apporté à leur édition francophone, nous sommes déterminés à proposer des mangas uniques, comme on n’en voit que trop peu sous nos latitudes, mêlant divertissement de haute volée et identité artistique forte."

Sangsues #5 (fin): Rien qu'à voir la différence d'expression entre la Hako de la couverture du tome 1 et celle-là, on sent que notre héroïne a bien évolué. Chapeau à Casterman pour le travail sur ces jaquettes (différentes des originales japonaises), c'est très réussi!

Je l'espérais, et mon attente n'est pas déçue: le final de la série est extrêmement bien fichu, et hyper prenant.
Gros coup de cœur sur ce titre en seulement 5 tomes!  

Dans les premières pages, c'est avec émotion qu'on retrouve Hako et Kara en bien mauvaise posture, et séparés. Face à eux, des sangsues ou des gangsters sans scrupules, prêts à les tuer. Mais qui a commandité ces kidnappings, et pourquoi?
Avec des révélations dosées avec justesse et sans surenchère, on démêle les nœuds de l'intrigue, et les intentions de ces parias de la société qui évoluent et vivent selon leurs propres règles.

L'action est ainsi au centre de ce tome, qui n'usurpe pas son étiquette de thriller. C'est d'ailleurs avec une nouvelle et froide détermination, et un sens de l'observation aiguisé par sa vie de sangsue, que Hako va se battre. Et les derniers affrontements du récit sont à couper le souffle!
En effet, les multiples rebondissements sont soutenus par le sens cinématographique de la mise en scène et par le trait léché de Daisuke Imai, qui nous immergent pleinement dans l'histoire. Et tout au long de ces planches impeccablement mises en page, notre œil est sans cesse attiré par un angle de vue original ou par un zoom sur un détail, un mouvement inattendu, une expression résolue, un frisson de stupeur, un regard lourd de sens, ou un sourire glaçant...
Je ne sais pas si ce genre de graphismes plaît au plus grand nombre, mais moi en tout cas, j'adore!


Par ailleurs, en filigrane de l'intense dénouement du scénario, on retrouve cette réflexion sur la solitude, sur notre capacité à nous intégrer à la société, et sur le sens qu'on veut donner à notre vie. Au-delà de la romance, si légèrement et subtilement distillée, ce qui transparaît dans l'intrigue c'est surtout la force d'attraction que certaines personnes peuvent avoir sur nous, et qui nous poussent à agir comme on le fait.
J'ai vraiment beaucoup aimé les derniers dialogues et les planches finales de Sangsues, qui portent vraiment tous ces sentiments. Il n'y a pas un mot ni un geste de trop - ni de moins.

En bref, voilà un bon petit manga de derrière les fagots, à l'édition soignée (avec de jolies pages couleurs et une bonne traduction/adaptation), et qui mérite toute votre attention si vous n'avez pas encore investi dedans! Mais qu'attendez-vous?