Jin-Roh, la brigade des loups
Jin-Roh, la brigade des loups ou simplement Jin Roh est un long métrage d'animation réalisé en 1998 par Hiroyuki Okiura dont c'est le 1er film. Il s'agit d'un animateur à la base qui retournera à l'animation suite à ce film, et qui reviendra encore une fois à la réalisation récemment avec Lettre à Momo.
L'animation est prise en charge par Production IG, et bien sur, Mamoru Oshii est au scénario.
En France le film est édité en plutôt bonne qualité par ... Film office, un éditeur que je ne connais pas. Le film n'est pas bien dur à trouver sur amazon ou en occasion, mais il n'est plus édité en neuf il me semble.
Synopsis :A Tokyo, Fusé est membre de l'unité Panzer, division armée de la police chargée d'anéantir tout opposant. Véritable machine à tuer, Fusé est chargé d'exterminer les terroristes du groupe appelé "la secte". Au cours d'une mission, il est incapable d'abattre une jeune rebelle. Celle-ci se suicide. Hanté par cette mort, Fusé rencontre par hasard sa soeur aînée, dont il tombe amoureux. Mais cette rencontre est-elle vraiment fortuite ? Fusé semble être l'instrument d'un complet qui vise à détruire l'unité Panzer et la brigade mythique des Jin-Roh (source : le dos du DVD).
Mon avis :Jin-Roh est un film possédant une aura assez particulière ... Il est cité par certaines communautés comme un classique incontournable, et effectivement, sa singularité, de son univers et de son synopsis, en font un titre à part, qui malgré le temps, est resté dans certaines mémoires !
Et comment leur donner tord, quand effectivement, un film d'animation avec un tel budget nous propose un univers dystopique presque contemporain, avec une identité visuelle si forte ? Et surtout, avec une animation si excellente !
Okiura est un animateur recherchant souvent un grand réalisme dans ses mouvements, et surchargeant ses animations de détails réalistes, ou du moins, de détails qui donnent une impression de réalisme et de fluidité. Et c'est d'emblée ce qui nous marque : Dès les premières secondes le film atteint un niveau de perfection dans son animation qu'il tiendra tous les reste du métrage ... Et rien que pour ça, le film vaut le détour, comme exemple type des spécificités de l'animation, et des possibilités uniques que ce mode de rendu permet pour faire passer des émotions.
Bien qu'ici le film soit très "réaliste", il n'aurait pas pu être fait en images réelles, car Okiura utilise pleinement toutes les possibilités que lui offre l'animation pour millimetrer chacun de ses plans, pour choisir LA bonne façon de montrer tel élément, LE bon timing, LA bonne vitesse ... Et c'est tout ça qui nous procure de l'émotion, les 15 premières minutes en sont l'exemple le plus flagrant !
Le scénario par contre ... C'est autre chose. J'avais déjà reproché à Mamoru Oshii d'être verbeux, de tout sur-expliquer, de ne rien montrer et d'à l'inverse de tout dire, à la façon d'un roman ... Et bien Jin-Roh n'est pas une exception (GiTS pourrait en être une ^^) et souffre énormément de ce problème, qui s'oppose directement avec le style de Okiura, un animateur qui cherche à montrer les émotions là ou Oshii se contente de nous les décrire froidement.
Cela n'enlève en rien à la qualité desdites émotions transmises, seulement le film en fait souvent trop, soit en expliquant tout, soit en faisant usage de pseudo-symbolisme-ésotérique, souvent sur-compliqué, et souvent hors-de-propos (l'abus de métaphores sur le chaperon rouge et sur les loups par exemple, ont tendance à devenir vites lourdes).
Il en va de même pour le scénario ... Qui est beaucoup trop compliqué pour son propre bien ... Et qui n'utilise pas du tout son contexte dystopique à bon escient : Le film hésite entre développer un univers sombre et sans pitié, mais perd des dizaines de minutes avec une romance qui aurait pu être intéressante si elle avait été plus développée, mieux développée, car le film se prend aussi vers la fin pour un thriller. Un thriller à l'intrigue si complexe qu'elle en perd tout son sens et tous son impact, car ses enjeux nous sont tellement étrangers que les conséquences des choix (enfin, des non-choix, puisque ici, le scénario prime sur les personnages) des personnages ne nous affectent plus.
Et c'est vraiment dommage car rien dans ces éléments n'est foncièrement mauvais, mais tout est très mal juxtaposé, la romance empiète sur la dystopie et le complot compliqué sur la romance, résultat : rien n'est vraiment exploré, et l'émotion ne pas plus bien.
Pourtant ... Quand viens le générique final ... Force est de constater qu'il s'est passé quelque chose, que de l'émotion a été produite !
Car oui, un scénario trop complexe c'est une chose, mais une ambiance maitrisée en est une autre, toute aussi importante, et Jin-Roh maitrise, grâce à son animation, son ambiance et son univers, qui nous enveloppe et nous marque !
Même si il ne s'agit pas là du chef-d’œuvre que certains clament, il s'agit d'une œuvre assez unique pour mériter sa place dans le patrimoine du cinéma d'animation japonnais. Effectivement, la participation de Oshii n'est pas forcément une bonne chose, car ce dernier apporte un scénario et des dialogues à la rue ... Mais il apporte aussi un côté très contemplatif au titre, que Okiura n'aurais pas apporté par lui même.
Au final, il s'agit là d'une expérience plastique avant tout, mais d'une expérience plastique qui à terme devient une expérience sensorielle et nous procure un sentiment assez étrange, singulier, qui rend ce titre mémorable, et donc, digne de votre intérêt !
4/5